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CORINNE OU L’ITALIE.

enfin, surtout, la part qu’avait son père dans cette histoire l’affligeait amèrement, et l’angoisse de son ame était telle, qu’il ne savait plus ce qu’il pensait, ni ce qu’il faisait. Il sortit précipitamment, à midi, par un soleil brûlant : à cette heure il n’y a personne dans les rues de Naples, l’effroi de la chaleur retient tous les êtres vivans à l’ombre. Il s’en alla du côté de Portici, marchant au hasard et sans dessein, et les rayons ardens qui tombaient sur sa tête excitaient tout à la fois et troublaient ses pensées.

Corinne cependant, après quelques heures d’attente, ne put résister au besoin de voir Oswald ; elle entra dans sa chambre, et ne l’y trouvant point, cette absence dans ce moment lui causa une terreur mortelle. Elle vit sur la table de lord Nelvil ce qu’elle lui avait écrit, et, ne doutant pas que ce ne fût après l’avoir lu qu’il s’en était allé, elle s’imagina qu’il était parti tout-à-fait, et qu’elle ne le reverrait plus. Alors une douleur insupportable s’empara d’elle ; elle essaya d’attendre, et chaque moment la consumait ; elle parcourait sa chambre à grands pas, et puis s’arrêtait soudain, de peur de perdre le moindre bruit qui pourrait annoncer le retour. Enfin, ne résistant plus à son anxiété, elle descendit pour demander si l’on n’avait pas vu pas-