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CORINNE OU L’ITALIE.

vivrons tous les deux, dit Oswald ; je reviendrai — Vous reviendrez ? interrompit Corinne ; ah ! vous voulez donc partir ! Qu’est-il arrivé ? qu’y a-t-il de changé depuis hier ? malheureuse que je suis ! — Chère amie ! que ton cœur ne se trouble pas ainsi, reprit Oswald, et laisse-moi, si je le puis, te révéler ce que j’éprouve ; c’est moins que tu ne crains, bien moins ; mais il faut, dit-il en faisant effort sur lui-même pour s’expliquer, il faut pourtant que je connaisse les raisons que mon père peut avoir eues pour s’opposer, il y a sept ans, à notre union ; il ne m’en a jamais parlé : j’ignore tout à cet égard ; mais son ami le plus intime, qui vit encore en Angleterre, saura quels étaient ses motifs. Si, comme je le crois, ils ne tiennent qu’à des circonstances de peu d’importance, je ne les compterai pour rien ; je le pardonnerai d’avoir quitté le pays de ton père et le mien, une si noble patrie ; j’espèrerai que l’amour t’y rattachera, et que tu préféreras le bonheur domestique, les vertus sensibles et naturelles, à l’éclat même de ton génie. J’espèrerai tout, je ferai tout ; mais si mon père s’était prononcé contre toi, Corinne, je ne serais jamais l’époux d’une autre ; mais jamais aussi je ne pourrais être le tien. —