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CORINNE OU L’ITALIE.

dant n’est point satisfaite ; et quand on sait à la fin ce que cache tout ce charme du silence et de l’inconnu, le mystère aussi se flétrit, et l’on en revient à regretter l’abandon et le mouvement d’un caractère animé. Hélas ! de quelle manière prolonger cet enchantement du cœur, ces délices de l’ame, que la confiance et le doute, le bonheur et le malheur dissipent également à la longue, tant les jouissances célestes sont étrangères à notre destinée ! Elles traversent notre cœur quelquefois, seulement pour nous rappeler notre origine et notre espoir.

Lady Edgermond se trouvant mieux fixa son départ à deux jours de là, pour aller en Écosse, où elle voulait visiter la terre de lord Edgermond, qui était voisine de celle de lord Nelvil. Elle s’attendait qu’il lui proposerait de l’y accompagner, puisqu’il avait annoncé le projet de retourner en Écosse avant le départ de son régiment. Mais il n’en dit rien. Lucile le regarda dans ce moment, et néanmoins il se tut. Elle se hâta de se lever, et s’approcha de la fenêtre. Peu de momens après, lord Nelvil prit un prétexte pour aller vers elle, et il lui sembla que ses yeux étaient mouillés de pleurs : il en fut ému, soupira, et l’oubli dont il accusait son amie reve-