Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/389

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choisie pour supporter cette peine ? Ne pourrais-je pas aussi demander comme votre divin fils que cette coupe s’éloignât de moi. ? —

L’air actif et occupé des habitans de la ville étonna Corinne. Depuis qu’elle n’avait plus aucun intérêt dans la vie, elle ne concevait pas ce qui faisait avancer, revenir, se hâter ; et traînant lentement ses pas sur les larges pierres du pavé de Florence, elle perdait l’idée d’arriver, ne se souvenant plus où elle avait l’intention d’aller : enfin elle se trouva devant les fameuses portes d’airain, sculptées par Ghiberti, pour le baptistère de Saint-Jean, qui est à côté de la cathédrale de Florence.

Elle examina quelque temps ce travail immense, où des nations de bronze, dans des proportions très-petites, mais très-distinctes, offrent une multitude de physionomies variées, qui toutes expriment une pensée de l’artiste, une conception de son esprit. — Quelle patience, s’écria Corinne, quel respect pour la postérité ! et cependant combien peu de personnes examinent avec soin ces portes à travers lesquelles la foule passe avec distraction, ignorance ou dédain. Oh qu’il est difficile à l’homme d’échapper à l’oubli, et que la mort est puissante ! —