LORD Nelvil partit alors pour la terre de lady
Edgermond dans le Northumberland, il fallait
qu’il fit de nouveau connaissance avec sa famille
dont il avait perdu l’habitude depuis quatre ans.
Lucile lui présenta sa fille, âgée de plus de trois
ans, avec autant de timidité qu’une femme coupable
en pourrait éprouver. Cette petite ressemblait
à Corinne : l’imagination de Lucile avait
été fort occupée du souvenir de sa sœur pendant
sa grossesse ; et Juliette, c’était ainsi qu’elle
se nommait, avait les cheveux et les yeux de
Corinne : lord Nelvil le remarqua et en fut troublé ;
il la prit dans ses bras, et la serra contre
son cœur avec tendresse. Lucile ne vit dans ce
mouvement qu’un souvenir de Corinne, et dès
cet instant elle ne jouit pas, sans mélange, de
l’affection que lord Nelvil témoignait à Juliette.
Lucile était encore embellie, elle avait près de
vingt ans. Sa beauté avait pris un caractère imposant,
et inspirait à lord Nelvil un sentiment de