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CORINNE OU L’ITALIE.

dangereux, qu’il n’y eut plus entre Lucile et lord Nelvil d’autre sujet d’entretien que sa maladie ; la pauvre femme perdit l’usage de la parole un mois avant de mourir ; l’on ne devinait plus qu’à ses larmes ou à sa façon de serrer la main ce qu’elle voulait dire. Lucile était au désespoir ; Oswald, sincèrement touché, veillait toutes les nuits auprès d’elle ; et, comme c’était au mois de novembre, il se fit beaucoup de mal par les soins qu’il lui prodigua. Lady Edgermond parut heureuse des témoignages de l’affection de son gendre. Les défauts de son caractère disparaissaient à mesure que son affreux état les eut rendus plus excusables, tant les approches de la mort tranquillisent toutes les agitations de l’ame ; et la plupart des défauts ne viennent que de cette agitation.

La nuit de sa mort elle prit la main de Lucile et celle de lord Nelvil, et les mettant l’une dans l’autre elle les pressa toutes les deux contre son cœur, alors elle leva les yeux au ciel, et ne parut point regretter la parole qui n’eût rien dit de plus que ce regard et ce mouvement. Peu de minutes après elle expira.

Lord Nelvil, qui avait fait effort sur lui-même pour être capable de soigner sa belle-mère, devint dangereusement malade ; et l’infortunée