Page:Debussy - Monsieur Croche, 1921.djvu/33

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connue des pensionnaires sous le nom de « Tombeau Étrusque » —, M. Hébert m’affirma que cela n’avait aucune importance. Il ajoutait même qu’on pouvait au besoin coucher dans les ruines du Colisée… Le bénéfice d’y éprouver le « frisson historique » compensant le risque d’y prendre la fièvre.

M. Hébert aimait passionnément la musique, mais pas du tout celle de Wagner ; à cette époque, où j’étais wagnérien jusqu’à l’oubli des principes les plus simples de la civilité, j’étais loin de me douter que j’arriverais à penser à peu près comme ce vieillard passionné qui a fait le tour des sentiments, avec clairvoyance, quand nous en sommes à peine à savoir ce qu’ils contiennent et comment on peut s’en servir.

Alors, commence cette vie de « pensionnaire » qui tient à la fois de l’hôtel cosmopolite, du collège libre, de la caserne laïque et obligatoire… Je revois la salle à manger de la Villa où s’alignent les portraits des prix de Rome de jadis et d’hier. Il y en a jusqu’au plafond ; on ne les distingue même plus très bien ; il est vrai que l’on n’en parle même plus du tout. Dans toutes ces figures, on retrouve la même expression un peu triste ; elles ont l’air « déracinées… ». Au bout de quelques mois, la multiplicité de ces cadres aux dimensions immuables donne à qui la contemple, l’impression que c’est le même prix de Rome répété à l’infini !