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XVI
PRÉFACE DU TRADUCTEUR

Je ne veux point parler ici de la puissance artistique de Daniel de Foë. Il suffira de lire et d’admirer la vérité nue des sentiments et des actions. Ceux qui n’aiment pas seulement Robinson comme le livre de leur enfance trouveront dans Moll Flanders les mêmes plaisirs et les mêmes terreurs.

Georges Borrow raconte dans Lavengro qu’il rencontra sur le pont de Londres une vieille femme qui ne lisait qu’un livre. Elle ne voulait le vendre à aucun prix. Elle y trouvait tout son amusement et toute sa consolation. C’était un ancien livre aux pages usées. Borrow en lut quelques lignes : aussitôt il reconnut l’air, le style, l’esprit de l’écrivain du livre où d’abord il avait appris à lire. Il couvrit son visage de ses mains, et pensa à son enfance… Ce livre de la vieille femme était Moll Flanders.

Il me reste à dire quelques mots de ma traduction. Je sens qu’elle est bien imparfaite, mais elle a au moins un mérite : partout où cela a été possible, les phrases ont conservé le mouvement et les coupures de la prose de de Foë. J’ai respecté la couleur du style autant que j’ai pu. Les nonchalances de langage et les redites exquises de la narratrice ont été rendues avec le plus grand soin. Enfin j’ai essayé de mettre sous les yeux du lecteur français l’œuvre même de Daniel de Foë.


Marcel Schwob.