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MOLL FLANDERS

reur quand je réfléchissais que c’était le lieu de ma naissance malheureuse et des infortunes de ma mère, que je ne pus le supporter davantage et que je cessai mes visites.

Et oh ! si j’avais pu être avertie par leurs désastres, j’aurais pu être heureuse encore, car jusque-là j’étais libre, et aucune accusation n’avait été portée contre moi ; mais voilà qui ne pouvait être ; ma mesure n’était pas encore pleine.

Ma camarade, portant la marque d’une ancienne réprouvée, fut exécutée ; la jeune criminelle eut grâce de la vie, ayant obtenu un sursis ; mais resta de longs jours à souffrir de la faim dans sa prison, jusqu’enfin elle fit mettre son nom dans ce qu’on appelle une lettre de rémission et ainsi échappa.

Ce terrible exemple de ma camarade me frappa de frayeur au cœur ; et pendant un bon temps je ne fis point d’excursions. Mais une nuit, dans le voisinage de la maison de ma gouvernante, on cria : Au feu ! Ma gouvernante se mit à la fenêtre, car nous étions toutes levées, et cria immédiatement que la maison de Mme Une telle était toute en feu, flambant par le haut, ce qui était la vérité. Ici elle me poussa du coude.

— Vite, mon enfant, dit-elle ; voici une excellente occasion ; le feu est si près que vous pouvez y aller devant que la rue soit barrée par la foule.

Puis elle me donna mon rôle :

— Allez, mon enfant, à la maison ; courez et dites à la dame ou à quiconque vous verrez que vous êtes venue pour leur aider, et que vous venez de chez Mme Une telle, c’est à savoir une personne qu’elle connaissait plus loin dans la rue.