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MOLL FLANDERS

La prochaine affaire d’importance fut une tentative sur la montre en or d’une dame. La chose survint dans une presse, à l’entrée d’une église, où je fus en fort grand danger de me faire prendre ; je tenais sa montre tout à plein ; mais, donnant une grosse bousculade comme si quelqu’un m’eût poussée sur elle, et entre temps ayant bellement tiré sur la montre, je trouvai qu’elle ne venait pas à moi ; je la lâchai donc sur-le-champ, et me mis à crier comme si on allait me tuer, qu’un homme venait de me marcher sur le pied, et qu’il y avait certainement là des filous, puisque quelqu’un ou d’autre venait de tirer sur ma montre : car vous devez observer qu’en ces aventures nous allions toujours fort bien vêtues et je portais de très bons habits, avec une montre d’or au côté, semblant autant d’une dame que d’autres.

À peine avais-je parlé que l’autre dame se mit à crier aussi : « Au voleur », car on venait, dit-elle, d’essayer de décrocher sa montre.

Quand j’avais touché sa montre, j’étais tout près d’elle, mais quand je m’écriai, je m’arrêtai pour ainsi dire court, et la foule l’entraînant un peu en avant, elle fit du bruit aussi, mais ce fut à quelque distance de moi, si bien qu’elle ne me soupçonna pas le moins du monde ; mais quand elle cria « au voleur », quelqu’un s’écria : « Oui-da, et il y en a un autre par ici, on vient d’essayer de voler madame. »

Dans ce même instant, un peu plus loin dans la foule, et à mon grand bonheur, on cria encore : « Au voleur ! » et vraiment on prit un jeune homme sur le fait. Ceci, bien qu’infortuné pour le misérable, arriva fort à point pour mon cas, malgré que j’eusse bravement porté jusque-là