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MOLL FLANDERS

en faire fi, et vous pouvez bien penser que j’eus le cœur empli de mille réflexions sur le parti que je devais prendre et la façon dont je devais me faire connaître, ou si je devrais jamais me faire connaître ou non.

C’était là un embarras où je n’avais pas, en vérité, la science de me conduire, ni ne savais-je quel parti prendre ; mon esprit était obsédé nuit et jour ; je ne pouvais ni dormir ni causer ; tant que mon mari s’en aperçut, s’étonna de ce que j’avais et s’efforça de me divertir, mais ce fut tout en vain ; il me pressa de lui dire ce qui me tourmentait, mais je le remis, jusqu’enfin, m’importunant continuellement, je fus forcée de forger une histoire qui avait cependant un fondement réel, je lui dis que j’étais tourmentée parce que j’avais trouvé que nous devions quitter notre installation et changer notre plan d’établissement, à cause que j’avais trouvé que je serais découverte si je restais dans cette partie de la contrée ; car, ma mère étant morte, plusieurs de nos parents étaient venus dans la région où nous étions et qu’il fallait, ou bien me découvrir à eux, ce qui dans notre condition présente, ne convenait point sous bien des rapports, ou bien nous en aller, et que je ne savais comment faire et que c’était là ce qui me donnait de la mélancolie.

Il acquiesça en ceci qu’il ne convenait nullement que je me fisse connaître à personne dans les circonstances où nous étions alors, et par ainsi il me dit qu’il était prêt à partir pour toute autre région de ce pays ou même pour un autre pays si je le désirais. Mais maintenant j’eus une autre difficulté, qui était que si je partais pour une autre colonie, je me mettais hors d’état de