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MOLL FLANDERS

blier à ce point les obligations que je vous ai, et à toute votre maison, et souffrir de consentir à une chose que je savais devoir vous être nécessairement fort désobligeante, et je lui ai dit positivement que jamais je n’entretiendrais une pensée de cette sorte, à moins d’avoir votre consentement, et aussi celui de son père, à qui j’étais liée par tant d’invincibles obligations.

— Et ceci est-il possible, madame Betty ? dit la vieille dame. Alors vous avez été bien plus juste envers nous que nous ne l’avons été pour vous ; car nous vous avons tous regardée comme une espèce de piège dressé contre mon fils ; et j’avais à vous faire une proposition au sujet de votre départ, qui était causé par cette crainte ; mais je n’en avais pas fait encore mention, parce que je redoutais de trop vous affliger et de vous abattre de nouveau ; car nous avons encore de l’estime pour vous, quoique non pas au point de la laisser tourner à la ruine de mon fils ; mais s’il en est comme vous dites, nous vous avons tous fait grand tort.

— Pour ce qui est de la vérité de ce que j’avance, madame, dis-je, je vous en remets à votre fils lui-même : s’il veut me faire quelque justice, il vous dira l’histoire tout justement comme je l’ai dite.

Voilà la vieille dame partie chez ses filles, et leur raconte toute l’histoire justement comme je la lui avais dite, et vous pensez bien qu’elles en furent surprises comme je croyais qu’elles le seraient ; l’une dit qu’elle ne l’aurait jamais cru ; l’autre, que Robin était un sot ; une autre dit qu’elle n’en croyait pas un mot, et qu’elle gagerait que Robin raconterait l’histoire d’autre façon ; mais la vieille dame, résolue à aller au fond des choses,