Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/307

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avaient levé le camp et s’ils n’avaient pas laissé derrière eux quelques traces du dommage que nous leur avions fait. Je pensais que, s’il nous était possible d’en surprendre un ou deux, nous pourrions peut-être ravoir notre homme en échange.

Nous mîmes pied à terre sans bruit, et nous divisâmes notre monde en deux bandes : le bosseman en commandait une, et moi l’autre. Nous n’entendîmes ni ne vîmes personne bouger quand nous opérâmes notre descente ; nous poussâmes donc en avant vers le lieu du combat, gardant quelque distance entre nos deux bataillons. De prime-abord, nous n’apperçûmes rien : il faisait très-noir ; mais, peu après, notre maître d’équipage, qui conduisait l’avant-garde, broncha, et tomba sur un cadavre. Là-dessus touts firent halte, et, jugeant par cette circonstance qu’ils se trouvaient à la place même où les Indiens avaient pris position, ils attendirent mon arrivée. Alors nous résolûmes de demeurer là jusqu’à ce que, à la lueur de la lune, qui devait monter à l’horizon avant une heure, nous pussions reconnaître la perte que nous leur avions fait essuyer. Nous comptâmes trente-deux corps restés sur la place, dont deux n’étaient pas tout-à-fait morts. Les uns avaient un bras de moins, les autres une jambe, un autre la tête. Les blessés, à ce que nous supposâmes, avaient été enlevés.

Quand à mon sens nous eûmes fait une complète découverte de tout ce que nous pouvions espérer connaître, je me disposai à retourner à bord ; mais le maître d’équipage et sa bande me firent savoir qu’ils étaient déterminés à faire une visite à la ville indienne où ces chiens, comme ils les appelaient, faisaient leur demeure, et me prièrent de venir avec eux. S’ils pouvaient y pénétrer, comme ils se l’imaginaient, ils ne doutaient pas, disaient-ils, de faire un