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HÉLIKA.

Le lendemain soir, Baptiste revint chez moi pendant que nous étions seuls, je lui fis part du plan que j’avais conçu de mettre Adala et sa grande mère en sûreté et de donner ensuite la chasse aux bandits. Il m’approuva de tout cœur.

Ce qui me faisait hâter davantage c’est que la rumeur rapportait qu’un meurtre atroce avait été commis à une douzaine de lieues de l’endroit que j’habitais.

En voici les détails : Deux sauvages étaient entrés dans la maison d’un riche et honnête cultivateur. C’était un dimanche, et tout le monde assistait au service divin. La mère de famille était restée seule avec deux petits enfants dont l’aîné pouvait avoir sept ans et la plus jeune cinq.

Cette jeune femme était très hospitalière et très charitable, aussi accorda-t-elle volontiers la nourriture que les deux sauvages avaient demandée en entrant.

Lorsqu’ils eurent pris un copieux repas, ils exigèrent de l’argent.

La pauvre mère comprit alors qu’elle avait affaire à des scélérats et qu’elle pouvait redouter les derniers outrages. Elle chercha à gagner du temps espérant qu’on reviendrait bientôt de l’église lui porter secours.

Par malheur pour elle, la messe avait été beaucoup retardée, le curé ayant été obligé d’aller administrer les derniers sacrements à un homme mourant.

C’est alors que Paulo, saisissant son tomahawk, en asséna un coup terrible sur la tête de l’infortunée qui tomba assommée. Deux crimes affreux furent accomplis ensuite.

Les infâmes firent des recherches dans tous les coins de la maison et découvrirent une somme considérable d’argent qu’ils séparèrent entre eux puis ils disparurent.

Les enfants avaient été enfermés dans un cabinet pendant l’accomplissement de ce drame odieux. Le complice de Paulo les avait menacés de sa hache avec des imprécations effroyables et jurait de leur fendre la tête s’ils proféraient une parole ou essayaient de sortir.

Les pauvres petits s’étaient blottis l’un près de l’autre demi-morts de terreur, n’osant pas pleurer et retenant leur respiration.

Lorsque le bruit eut cessé, le plus âgé se décida à s’avancer tout doucement vers la fenêtre. Il aperçut les deux bandits qui fuyaient dans la direction du bois. Ils sortirent alors de leur cachette, ouvrirent la porte de l’appartement où ils avaient vu leur mère pour la dernière fois. Une mare de sang inondait le plancher. Hélas ! la pauvre femme n’était plus qu’un cadavre.