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qu’occupait Segni, et de temps à autre il répétait : — C’est horrible, c’est affreux, abominable ! Enfin, monsieur l’abbé, dit-il enfin, puisque vous voulez bien satisfaire aux intentions de mon père, en dirigeant mes premiers pas dans la carrière où l’on m’engage, ayez la bonté d’apporter quelques lumières dans mon esprit troublé, confondu, par ce que cet infernal prêtre a vomi de sa chaire. Quel profit en puis-je tirer ? Qu’est-ce que cette dona Olimpia Maldachini par exemple ? Est-ce un être réel ou imaginaire ? Vous devez sentir qu’il est de quelque importance pour moi de savoir à quoi m’en tenir sur un pareil personnage, et je crois être en droit de vous prier de lever mes doutes à ce sujet. »

C’est toujours une chose très-pénible pour un honnête homme que d’avouer des désordres qu’il condamne intérieurement, et sur lesquels sa position dans le monde le force de garder le silence. L’abbé Ségni, à qui la requête du jeune de Beauvoir parut juste, resta quelques instants indécis. Puis réfléchissant qu’une réponse évasive aurait l’inconvénient de donner de ses sentiments une opinion désavantageuse : « Asseyez-vous, dit-il à son compagnon en le plaçant sur un siége voisin du sien ; je vais vous satisfaire. » Il tira alors de son porte-manteau le petit livre qu’il avait fait acheter la veille, et montra à M. de Beauvoir le second titre, ainsi conçu : Vie de dona Olimpia Maldachini, qui gouverne l’Église, sous le pontificat d’Innocent X. L’auteur de ce pamphlet, ajouta gravement l’abbé, est du petit nombre des Italiens qui se sont laissés séduire par les erreurs des hérétiques. Élevé près de la cour de Rome, il a dû la bien connaître en effet, et cet écrit pourra vous être utile. Mais permettez que je vous en fasse moi-même lecture, afin que je puisse y ajouter et en distraire tout ce qui le rendra plus conforme à la vérité. »

Après s’être assuré que les portes de l’appartement étaient bien fermées, l’abbé Segni revint prendre sa place, et commença à lire ce qui suit :

« Dona Olimpia est fille de Sforzia Maldachini, Romain, et de Vittoria Gualtieri. Ce Maldachini était simplement capitaine de milice, n’ayant à peu près d’autres ressources pour