Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/174

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regardé comme votre ennemi serait heureux de pouvoir vous servir. » En disant ces mots, il présenta à Olimpia un bijou dont le diamant principal valait au moins douze mille écus et se retira en la saluant.

» Dona Olimpia n’était rien moins qu’indifférente aux objets d’un grand prix ; mais ce qui fit surtout exalter son cœur en cette occasion, c’est que le premier hommage rendu à sa puissance lui était offert par son plus grand ennemi. De ce moment, elle sentit qu’elle régnait, et, sauf à pardonner par la suite, la perte des Barberins fut décidée. »

Ici se termine le récit de notre auteur, qui promet une suite, dit l’abbé Segni en fermant le livre. Malgré les exagérations qu’il contient, vous pouvez juger qu’on aurait tort de s’attendre à trouver la perfection à Rome, et peut-être me pardonnerez-vous les détours que j’ai pris pour vous préparer à de telles nouveautés. Le jeune de Beauvoir était si consterné de tout ce qu’il venait d’apprendre, qu’il ne put articuler que ces mots : Dona Olimpia !... Rome !... mais c’est un songe !... — Non, c’est une réalité, persuadez-vous-le bien, répondit l’abbé, et plus vous êtes sincère et ardent catholique, plus vous devez chercher à connaître la vérité. Quant à moi, pour rien au monde je ne voudrais avoir manqué l’occasion de recueillir tout ce que j’ai appris dans cette ville. J’ignore, ajouta-t-il en levant les yeux vers le ciel, si le parti que je compte en tirer pour servir les véritables intérêts de l’Église ne me perdra pas ; mais quoi qu’il arrive, je remplirai mon devoir. On m’a donné l’ordre d’observer ; je dirai ce que j’ai vu, ce que j’ai entendu.

Le lendemain, vers l’aube du jour, le joaillier arriva à l’auberge avec un guide et des chevaux. Les voyageurs ne tardèrent pas à se mettre en route. Souhaitons-leur bon voyage, et précédons-les à Rome, où nous aurons peut-être l’occasion de les retrouver.