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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

La peinture est le métier le plus long et le plus difficile : il lui faut l’érudition comme au compositeur, mais il lui faut aussi l’exécution comme au violon.

19 septembre. — Je vois dans les peintres des prosateurs et des poètes. La rime les entrave ; le tour indispensable aux vers et qui leur donne tant de vigueur est l’analogue de la symétrie cachée, du balancement en même temps savant et inspiré qui règle les rencontres ou l’écartement des lignes, les taches, les rappels de couleur, etc. Ce thème est facile à démontrer, seulement il faut des organes plus actifs et une sensibilité plus grande pour distinguer la faute, la discordance, le faux rapport dans des lignes et des couleurs, que pour s’apercevoir qu’une rime est inexacte et l’hémistiche gauchement ou mal suspendu ; mais la beauté des vers ne consiste pas dans l’exactitude à obéir aux règles dont l’inobservation saute aux yeux des plus ignorants : elle réside dans mille harmonies et convenances cachées, qui font la force poétique et qui vont à l’imagination ; de même que l’heureux choix des formes et leur rapport bien entendu agissent sur l’imagination dans l’art de la peinture. Les Thermopyles de David sont de la prose mâle et vigoureuse, j’en conviens. Poussin ne réveille presque jamais d’idée par

    à Carpentras en 1825 ; car le compositeur s’occupait beaucoup de peinture, et le peintre, de musique. Jules Laurens, qui était entré en 1844 à l’École des beaux-arts, se fixa ensuite définitivement à Carpentras.