Page:Delatour - Adam Smith sa vie, ses travaux, ses doctrines.djvu/138

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formation des idées d’après la perception des sens ; nous n’y insisterons pas, d’autant plus qu’elle a peu de rapport avec l’ensemble de l’œuvre d’Adam Smith.


En résumé, dans tous ces Essais philosophiques, comme dans la Théorie des sentiments moraux et les Considérations sur la formation des langues, on remarque partout les traces de la même méthode, que Smith paraît avoir exclusivement suivie, surtout dans la première partie de sa vie, la méthode déductive. Partout, il est vrai, on trouve une infinité de faits, une multitude d’observations, mais ces faits ne sont pas là pour servir de base au raisonnement, ils ne servent qu’à vérifier et à contrôler les résultats de la déduction. Dans ces Essais, l’auteur ne commence pas par exposer les données de l’histoire pour en tirer les lois générales qui régissent le développement de l’intellect humain ; dès le début, au contraire, il pose les principes et il s’efforce ensuite de démontrer que ces principes devaient provoquer les progrès mêmes que l’histoire a constatés. En d’autres termes, en partant des lois il cherche à retrouver les effets, au lieu de partir des faits pour remonter aux causes ; il cherche à tracer la marche qu’ont dû suivre les découvertes de la science, au lieu d’indiquer d’abord ce qu’elles ont été. Ce mode de raisonnement et d’exposition l’a conduit à des hypothèses quelquefois téméraires, il est vrai, mais toujours originales, et la multitude d’observations ingénieuses qu’il a groupées avec art pour les vérifier, ont donné un véritable charme à la lecture de ses écrits. D’ailleurs, l’étendue et la variété de son savoir, ainsi que le caractère consciencieux de ses œuvres, ne sont pas aussi sans offrir un grand attrait, Le style même est généralement très soigné : bien que diffus et relâché dans la Richesse des Nations où l’auteur tenait avant tout à être clair en exposant les éléments d’une science nouvelle, il est ici plus correct, souvent même élégant, et on pourrait peut-être lui reprocher plutôt une certaine redondance un peu déclamatoire.

Aussi lit-on avec un vif intérêt ces éléments épars qui permettent de reconstituer par la pensée le plan de la première partie de la grande œuvre du célèbre philosophe. Dans cette