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sions extraordinaire, une partie de ce qu’on gagne. Ainsi, quoique le principe qui pousse à dépenser l’emporte chez presque tous les hommes en certaines occasions, et presque en toutes les occasions chez certaines personnes, cependant, chez la plupart des hommes, en prenant en somme tout le cours de leur vie, il semble que le principe qui porte à l’économie, non seulement prévaut à la longue, mais prévaut même avec force. …Dans presque toutes les circonstances, l’économie et la sage conduite privée suffisent, non seulement pour compenser l’effet de la prodigalité et de l’imprudence des particuliers, mais même pour balancer celui des profusions excessives des gouvernements. »


Toute cette doctrine de l’épargne est fort remarquable, et on pourrait multiplier les citations sans qu’aucun point soulève de sérieuses objections. Le célèbre économiste a fait un parallèle très net des deux genres de consommations que J.-B. Say a appelées plus tard consommations improductives et consommations reproductives ; et il a fort clairement démontré que toute consommation, qu’elle soit par sa fin improductive ou reproductive, donne toujours lieu immédiatement à une même somme de services personnels, la différence fondamentale consistant en ce que, dans le premier cas, la consommation faite ne se renouvelle pas, tandis que, dans le second, elle se renouvelle et se multiplie.

Le seul reproche que l’on puisse faire peut-être à cette étude est de n’avoir pas distingué assez nettement, parmi les consommations improductives, les consommations nécessaires et les consommations de luxe. Il est vrai que le luxe est bien difficile à déterminer, et Smith n’en a pas abordé directement la définition. « Par objets de nécessité, dit-il quelque part[1], j’entends non seulement les denrées qui sont indispensablement nécessaires au soutien de la vie, mais encore toutes les choses dont les honnêtes gens, même de la dernière classe du peuple, ne sauraient décemment manquer, selon les usages du pays… Toutes les autres choses, je les appelle luxe, sans néanmoins

  1. Rich., liv. V, ch. IV (t. II, p. 562).