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loi fondamentale de l’État, que tout autre impôt dont la perception serait à toujours réglée d’après une évaluation fixe. »

L’étude de l’impôt sur le loyer des maisons est moins nette. Toutefois, si Adam Smith a laissé ici dans un certain vague la question de l’incidence, il a eu néanmoins le mérite de reconnaître le premier que cette incidence dépend, en réalité, de l’offre et de la demande des maisons. De même, il a distingué avec soin le loyer du sol de celui du bâtiment et émis le vœu que ces deux éléments fussent imposés séparément à cause de leurs caractères différents.

Enfin, il a montré comment le législateur, considérant que la valeur locative des maisons est difficile à évaluer directement, a jugé nécessaire de compléter ce mode d’imposition, soit par une taxe sur les feux, soit par une taxe sur les portes et fenêtres. Mais il désapprouve complètement ces bases de taxation : selon lui, l’estimation directe est généralement bien plus exacte que celle qui résulte du nombre des cheminées ou des ouvertures de toute sorte, et d’ailleurs, un impôt de cette nature viole nécessairement la règle de l’égalité. « La principale objection, dit-il, contre tous les impôts de cette espèce, c’est leur inégalité, et la pire de toutes les inégalités, puisqu’ils portent souvent avec plus de poids sur le pauvre que sur le riche. Une maison de dix livres de loyer, dans une ville de province, peut quelquefois avoir plus de fenêtres qu’une maison à Londres de 500 livres de loyer ; et, quoiqu’il soit à parier que le locataire de la première est beaucoup moins riche que celui de l’autre, cependant, en tant que sa contribution aux charges de l’État est réglée par la taxe des fenêtres, celui-là contribuera plus que le dernier. » L’inégalité, en effet, est inhérente à ce genre d’impôt, et, quoi qu’on fasse pour la supprimer, on ne peut la faire disparaître qu’en supprimant la taxe elle-même. Depuis Adam Smith, il est vrai, on a généralement établi des tarifs différents suivant la population de la commune, l’étage des fenêtres, la nature des portes, le nombre des ouvertures de l’ensemble de la maison, mais ces tarifications diverses ne peuvent jamais être assez multipliées, et, dans notre législation même, beaucoup d’inégalités subsistent encore.