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les officiers du duc. Bientôt, l’irritation populaire se traduisit par des troubles graves à Bruges : plusieurs magistrats périrent, et la duchesse de Bourgogne elle-même fut insultée.

Philippe le Bon, bien décidé à punir les rebelles, usa de dissimulation. Une expédition contre la Hollande lui servit de prétexte pour amener une forte armée dans le voisinage de la ville. On lui permit, à sa demande, de traverser celle-ci avec une simple escorte. Mais le duc, au mépris des conventions, s’empara de la porte de la Bouverie, et voulut pénétrer dans la ville avec toutes ses forces. Mal lui en prit. À peine fut-il entré avec une partie de ses archers que des rixes éclatèrent. Deux bourgeois furent mis à mort comme ils s’approchaient du prince pour lui faire hommage. À cette vue, la fureur de la multitude éclate : des cris de mort retentissent, l’escorte du duc est assaillie, la porte de la Bouverie est refermée, et les archers sont massacrés jusqu’au dernier ; le duc lui-même eût péri, si deux bourgeois, aussitôt mis à mort par la foule, ne lui eussent rouvert la porte de la Bouverie.

Le duc reparut peu après devant la ville avec des forces imposantes. Les Gantois, gagnés par ses artifices, avaient pris les armes contre leurs frères ! Le duc bloqua la ville, barrant les rivières et les canaux. Alors des milliers de marchands étrangers annoncèrent leur prochain départ de la ville, si la suspension du commerce se prolongeait. Cette perspective de ruine, la famine, la peste qui les décimait, décidèrent les Brugeois à solliciter leur pardon. Philippe y mit les conditions suivantes : les magistrats et les métiers iront au devant du duc, nu-tête, pieds nus, jusqu’à une lieue de la ville ; celle-ci payera une amende de deux cent mille pièces d’or. — Des fêtes éblouissantes célébrèrent à Bruges le rétablissement de la paix.

2. Gand (1453). — Les Gantois avaient commis une lourde faute en prêtant main-forte au duc de Bourgogne contre les Brugeois : ils en eurent la preuve quelques années plus tard. Au milieu de sa prospérité, le Grand Duc d’Occident — ainsi nommait-on Philippe le Bon — manquait souvent d’argent : ses guerres, la splendeur de sa cour, ses fêtes brillantes absorbaient des sommes énormes ! À plusieurs reprises, il altéra les monnaies ; cet expédient n’ayant pas suffi, il décréta en 1448 l’impôt de la gabelle, qui frappait le sel, et peu après celui