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La pauvreté desja presageant ses malheurs
A violé son taint par un ruisseau de pleurs,
Disant, Dieu te conserve ô terre desirable,
290Terre qui m’est trop plus que le ciel agreable,
Garde je te supply le plaisir de mon sang,
Et le guerdon aymé du travail de mon flanc.
Pour ton digne loier, si tu garde ma Fille,
Tu verras à jamais ta campagne fertile,
295Sans que le fer aigu de ces boiaux tranchans,
Ou le rude chartier vienne froisser tes champs.
Tes pleines produiront sans estre silonnees :
Les nations d’autour en seront estonnees.
Cela dit, la Deesse enferme son regret,
300Et venuë en Ida jusque au Dome secret
De la grande Cybelle ell’ honore l’image
Dans le Temple devot qu’un beau pinier ombrage
Par un fueillage espaix, que l’orage ne suit.
Un murmure venant des branches porte-fruit,
305S’accorde aux vers sacrez, dont le Temple resonne.
Les Thiases dedans font un bruit qui estonne :
Les simulacres fols y rassemblent leur voix.
Ida tremble, Gargare & les timides bois
Des forests d’alentour. Mais Ceres arrivante,
310Les tambours refrenans leur chanson violente,
La troupe se rapaise, & le buis & l’airain
Et le fer ne sent plus la Coribante main.
Les Lyons rugissans appaisent leur furie.
De cest advenement Cybelle resjouie
315Sort de son cabinet, & ses tours abaissant
Se presente au baiser doucement caressant