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265Descouvre sa Gorgone : & la Nymphe des bois
Luy veut faire sentir les trais de son carquois,
Ne cedant à leur oncle : on voit ces deux pucelles
S’esmouvoir pour une autre, & aux armes cruelles
Protestent de sauver leur innocente sœur,
270Et punir griefvement l’importun ravisseur,
Qui resemble au Lyon aiant pris la genice
Seul honneur des troupeaux, lors que par sa malice
Deschirant tout son corps d’un & d’autre costé,
Exerceant envers luy sa mesme cruauté,
275Du courroux des pasteurs il se moque, il se jouë,
Et les flots de sa jube en mespris il secouë.
Dompteur du monde vain, & le pire des trois,
Celuy a dit Pallas, où sont les saintes loix
Que tu garde aux Enfers ? les Eumenides fieres
280Te font elles trouver le plus meschant des freres ?
Pourquoy as tu laissé ton Royaume douteux,
Pour vouloir faire au monde un inceste honteux ?
Si ton desir lascif veut que tu te marie,
Espouse en ta maison une triste Furie
285Digne femme de toy. Veux tu donc assembler
Une vive à la mort, qui te doit resembler
Pour estre ainsi que toy cruelle & inhumaine ?
Laisse, laisse bien tost de ton frere le regne,
Et contant de ta nuit n’entreprends rien sur nous.
290En s’escriant ainsi elle frape en courrous
Du bord de son escu les puissans pieds-de-cornes
Desireux de courir & de passer les bornes
Du Royaume esclerci. Mais les Hidres sifflant
Au chef Gorgonien vont leurs crestes enflant,