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415Mais que sert de pleurer, & ne respondre point.
La Mere descouvrant la douleur qui la point
S’escrie : ô pauvre moy, il est tout manifeste
Que ce mal est venu par injure celeste !
Qu’attends-je vainement ? il faut aller chercher
420De l’ombre jusqu’au jour mon joyau le plus cher.
J’iray jusques au fond de la mer d’Iberie,
Et de la mer glacee, & de la mer rougie,
Sans repos, sans sommeil, sans fin je rechercheray.
Le Rin & le Risé, prompte je passeray.
425Ny pour les flots douteux des ondes Syrtiennes
Je ne lairray de voir les bornes anciennes
De Notus, & verray la negeuse maison
Du vent qui se fait craindre en l’arriere saison.
Aux portes d’orient je seray traversante
430Sur l’eschine d’Atlas : souz ma lumiere ardante
Hidaspes reluyra : que le traistre Jupin,
Que l’impie Junon, me tourmentent sans fin,
Amortissant du tout cest aspre jalousie.
Cependant de Ceres la lignee ravie
435Sera de leur orgueil le Trofee excellent.
Et moy pauvre Deesse en ce mal violant
J’iray de toutes pars incessemment errante
Ainsi dict, elle fait sa premiere descente
Sur le sommet d’Ætna, propre pour enflammer
440Les torches porte-jour qu’elle veut allumer.
Aupres du fleuve Acis aymé de Galatee,
(Qui baigne dedans luy sa poitrine laitee)
Est un bocage espais tout couvert de rameaux,
Voisinant de l’Ætna les eternels flambeaux.