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Ne vous souvient il plus des Titans, & comment
La terre s’esbranla & non le firmament ?
Pourquoy levez vous donc les enseignes impies,
110Auctorisant encor ces malheureuses vies ?
He nos pauvres fuseaux avoient ils merité
Que l’on rompit le cours de leur fatalité ?
Si vous avez desir d’esprouver ceste flame
Qui naist par la beauté d’une excellente Dame,
115Mandez le à Jupiter, il sçaura bien choisir
Ce qui doit contenter vostre amoureux desir.
Luy qui à pardonner se trouve inexorable,
S’esmeut par la priere, & son cueur non ploiable
Est doucement flechi : ainsi l’austere vent
120Borree impetueux s’empestre bien souvent
D’un espaix tourbillon : les neges & les gresles
Luy donnent des cheveux, & luy portent des aisles,
Pour ravager la mer, les champs & les forests.
Mais Eole au devant opposant ses arrests
125Avec des gons d’airain le renferme en son cloistre,
Et en ceste fureur l’empesche de paroistre.
Pluton aussi soudain se trouve rapaisé.
Il fait venir vers luy par un sentier aisé
Le disert fils de Maie, & lors il luy commande
130De porter dans les cieux sa servante demande.
L’oyseau Cillenien esbranle devant luy
Sa verge porte-somme, & plustost chasse-ennuy.
Ce pendant tout faché dans son trône il apuie
Son lourd septre vellu de relanteur moisie :
135Son visage est fort noir, ses cheveux mal pegnez :
Son chef hautain & fier, & ses yeux renfrongnez :