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Repoussant Lilibee, & la Tyrrene mer
S’eslance vers Pelore & ne peut l’abismer.
Au milieu est Ætna, qui monstre dans sa flamme
230Le triomphe des Dieux, de Geans le diffamme.
Le foier d’Encelade est tirant à costé,
Luy se voyant d’un nœu fortement garroté,
Exhale en ses souspirs une vive fornaise,
Qui tesmoigne l’ardeur de sa cruelle braise :
235Et lors que se faschant de son faix ennuieux,
Il destourne & gauchist son chef audacieux.
Ceste Isle est arrachee & les tremblantes villes,
Contre telles fureurs ont des murs inutiles.
L’on n’oseroit aussi voir le sommet sacré
240D’Ætne sejour des Dieux, s’il ne leur vient à gré.
Le haut n’en sent jamais du laboureur la trace.
Le reste de ce mont s’embellit par la grace
Des arbres verdoians, & en toutes saisons
Il soufle les challeurs de ses exhalaisons.
245Tantost par tremblemens il afflige la terre,
Puis d’un espoisse tache il fait au jour la guerre.
Les Astres il provoque, & à son detriment
Nourrist mesmes le feu de son embrasement.
Mais bien que ceste ardeur le brusle en mainte espace,
250Pourtant il garde foy à la nege & la glace,
Qui ne se fond du tout aux rayons de son feu,
Mais cuisant son humeur endurcist peu à peu.
Aussi qu’un froid secret & fidele fumee
L’empesche de se voir promptement consommee,
255Et la flamme incoulpable amasse au lieu voisin
Les goutes ruisselans de ce beau cristalin.