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i, 53-53. CDXLV. — Septembre 1646. 489

foy. Et bien qu'il foit bon d'auoir amitié auec la pluf- part de fes voifins, ie croy neantmoins que le meilleur eft de n'auoir point d'étroites alliances, qu'auec ceux qui font moins puiffans. Car, quelque fidélité qu'on 5 fe propofe d'auoir, on ne doit pas attendre la pareille des autres, mais faire fon conte qu'on en fera trompé, toutes les fois qu'ils y trouueront leur auantage ; & ceux qui font plus puiffans l'y peuuent trouuer, quand ils veulent, mais non pas ceux qui le font moins.

10 Pour ce qui eft des fuiets, il y en a de deux fortes : à fçauoir les grands & le peuple. le comprens, fous le nom de grands, tous ceux qui peuuent former des par- tis contre le Prince, de la fidélité defquels il doit eftre très affuré; ou, s'il ne l'eft pas, tous les politiques

i5 font d'accord qu'il doit employer tous fes foins à les abaiffer, & qu'en tant qu'ils font enclins à brouiller l'Eftat, il ne les doit confiderer que comme ennemis. Mais, pour fes autres fuiets, il doit fur tout éuiter leur haine & leur mépris; ce que ie croy qu'il peut touf-

20 iours faire, pouruû qu il obferue exactement la iuftice à leur mode (c'eft à dire fuiuant les loix aufquelles ils font accoutumez), fans eftre trop rigoureux aux puni- tions, ny trop indulgent aux grâces, & qu'il ne fe re- mette pas de tout à fes Minières, mais que, leur laif-

2) fant feulement la charge des condamnations plus odieufes, il témoigne auoir luy-mefme le foin de tout le refte; puis auffi, qu'il retienne tellement fa dignité, qu'il ne quitte rien des honneurs & des deferances que le peuple croit luy eftre deuës, mais qu'il n'en de-

3o mande point dauantage, & qu'il ne fafte paroiftre en public que fes plus ferieufes a&ions, ou celles qui

CORRESPONDANCE. IV. 6î

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