Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

i82 OEuvRES DE Descartes. 234-136.

chofe vraye.; mais l'obfcurité, laquelle feule me donne occafion de iuger que l'idée de ce fentiment | reprefente quelque objet hors de moy qu'on apelle froid, n'a point de caufe réelle, mais elle vient feulement de ce que ma nature n'efi: pas entièrement parfaite.

Et cela ne renuerfe en façon quelconque mes fondemens. Mais ce que i'aurois le plus à craindre, feroit que, ne m'eftant iamais beau- coup arrellé à lire les Hures des Philofophes, ie n'aurois peut-eftre pas fuiuy affez exadement leur façon de parler, lorfque i'ay dit que ces idées, qui donnent au iugement matière ou occafion d'erreur,

312 Gi\.o\tr\x matériellement \faujfes, fi ie ne trouuois que ce mot tnate- riellemcnt eft pris en la mefme fignification par le premier auteur qui m'elt tombé par hazard entre les mains pour m'en éclaircir : c'eit Suarez, en la Difpute 9, fedlion 2, n. 4.

Mais paffons aux chofes que M. Arnauld defapprouue le plus, & qui toutesfois me femblent mériter le moins fa cenfure : c'eft: à fçauoir,où i'ay dit qu'il nous ejîoit loiftble de penfer que Dieu fait en quelque façon la mefme chofe à l'égard de foy -mefme, que la caufe efficiente à l'égard defon effet.

Car, par cela mefme, i'ay nié ce qui luy femble vn peu hardy & n'eftre pas véritable, à fçauoir, que Dieu foit la caufe efficiente de fo3'-mefme, parce qu'en difant qu'/7/a/i en quelque façon la mefme chofe, i'ay monftré que ie ne croyois pas que ce fuft entièrement la mefme ; & en mettant deuant ces paroles : il nous ejl tout à fait loifible de penfer, i'ay donné à connoiltre que ie n'expliquois ainfi ces chofes, qu'à caufe de l'imperfeftion de l'efprit humain.

Mais qui plus eft, dans tout le relte de mes écrits, i'ay toufiours fait la mefme diftindion. Car dés le commencement, où i'ay dit qu'il n'y a aucune chofe dont on r.e puijfe rechercher la caufe efficiente, i'ay adiouté : ou, f\ elle n'en a point, demander pourquof elle ?i'én a pas befoin; lefquelles paroles témoignent affez que i'ay penfé que quelque chofe exiftoit, qui n'a pas befoin de caufe efficiente.

313 Or quelle chofe peut eftre telle, exceptéDieu ? | Et mefme vn peu après i'ay dit : qu'il y auoit en Dieu vneft grande &fi inépuifable puif- fayic'e, qu'il n'a iamais eu befoin d'aucun fecours pour exijler, & qu'il n'en a pas encore befoin pour ejtre conferué, en telle forte qu'il ejl en quelqtie façon la caufe de foy -mefme.

Là où ces paroles, la caufe de foy-mefme, ne peuuent en façon quelconque eftre entendues de la caufe efficiente, mais feulement que la puiffance inépuifable de Dieu eft la caufe ou la raifon pour laquelle il n'a pas beloin de caufe.

Et d'autant que cette puiffance inépuifable, ou cette- immenfité

�� �