Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/213

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

241-243. Quatrièmes Réponses. 187

expliquer les chofes qui apartiennent à la caufe formelle, c'ell à dire à l'effence mefme de Dieu.

Et il n'y a pas lieu de craindre en cecy aucune occafion d'erreur, d'autant que tout ce qui eft le propre de la caufe efficiente, | & qui ne peut eftre étendu à la caufe formelle, porte auec foy vne manifefte contradiclion, & partant, ne pouroit iamais eftre crû de perfonne, à fçauoir, qu'vne chofe foit différente de foy-mefme, ou bien qu'elle foit enfemble la mefme chofe, & non la mefme.

Et il faut remarquer que i'ay tellement attribué à Dieu la dignité d'eftre la caufe, qu'on ne peut pas de là inférer que ie luy aye auffi attribué l'imperfeldion d'eftre l'effet : car, comme les Théologiens, 321 lorfqu'ils difent que le Père eft \c principe du Fils, n'auouent pas pour cela que le Fils {o\i principié, ainfi, quoy que i'aye dit que Dieu pouuoit en quelque façon eftre dit la caufe de fqy-mefme, il ne fe trouuera pas neantmoins que ie I'aye nommé en aucun lieu l'effet de foy-mefme ; & ce d'autant qu'on a de couftume de raporter prin- cipalement l'effet à la caufe efficiente, & de le iuger moins noble qu'elle, quoy que fouuent il foit plus noble que les autres caufes.

Mais, lorfque ie prens l'effence entière de la chofe pour la caufe formelle, ie ne fuis en cela que les vertiges d'Ariftote ; car, au liu. 2 de fes Analyt. pofter., chap. 16, ayant cbmis la caufe matérielle, la première qu'il nomme eft celle qu'il appelle ai-r(y_y ti t1 rv Cvjy.i, ou, comme l'ont tourné fes interprètes, la caufe foj-melle, laquelle il étend à toutes les effences de toutes les chofes, parce qu'il ne traitte pas en ce lieu-là des caufes du compofé phyfique (non plus que ie fais icy), mais généralement des caufes d'où l'on peut tirer quelque connoiffance.

Or, pour faire voir qu'il eftoit malaifé, dans la queftion propofce, de ne pomt attribuer à Dieu le nom de caufe, il n'en faut point de meilleure preuue que, de ce que Monfieur Arnauld ayant tâché de conclure par vne autre voye la mefme chofe que moy, il n'en eft pas neantmoins venu à bout, au moins à mon iugement.

Car, après auoir amplement montré que Dieu ( n'eft pas la caufe 322 efficiente | de foy-mefme, parce qu'il eft de la nature de la caufe effi- ciente d'eftre différente de fon effed; ayant auffi fait voir qu'il n'efl pas par (oy pofitiuement, entendant par ce mot pqfitiuement vne in- fluence pofitiue de la caufe, & auffi qu'à vray dire il ne fe conferue pas foy-mefme, prenant le mot de conferualioit pour vne continuelle reproduction de la chofe (de toutes lefquelles chofes ie fuis d'acord auec luy), après tout cela il veut derechef prouuer que Dieu ne doit pas eftre dit la caufe efficiente de foy-mefme : parce que, dit-il, la

�� �