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Principes. — Première Partie. ^7

��6q. Qu'on connoijl tout autrement les grandeurs, les figures, &c., que les couleurs, les douleurs, êc'

Principalement s'il confidere qu'il connoift bien d'vne autre façon ce que c'ell que la grandeur dans le corps qu'il apperçoit, ou la figure, ou le mouuement, au moins celuy qui le fait d'vn lieu en vn autre (car les Philofophes, en feignant d'autres mouuemens que celuy-cy, n'ont pas connu fi facilement fa vraye nature), ou la fitua- tion des parties, ou la durée, ou le nombre, & les autres propriete:{ que nous apperceuons clairement en tous les corps, comme il a efté def-ja remarqué ', que non pas ce que c'eft que la couleur dans le mefme corps, ou la | douleur, l'odeur, le goitjî, la faueur, & tout ce 52 que j'ay dit deuoir efire attribué au fens. Car, encore que, voyant vn corps, nous ne foyons pas moins affurez de fonexiftence, par la couleur que nous apperceuons à l'on occafion, que par la figure qui |e termine, toutefois il ejl certain que nous connoiflbns tout autre- ment en luy cette propriété qui eft caufe que nous difons qu'il "eft figuré, que celle qui fait qu'il nous femble coloré.

-0. Que nous pouuons juger en deux façons des chofes fenfibles, par l'vne de/quelles nous tombons en erreur, £■ par l'autre nous l'éuitons.

Il e(t donc éuident, lors que nous difons à quelqu'ini que nous apperceuons des couleurs dans les objets, qu'il en elt de mefme que fi nous luy difions que nous apperceuons en ces objets je ne fçay quoy dont nous ignorons la nature, mais qui caufe pourtant en nous vn certain fentiment, fort clair & manifefte, qu'on nomme le fenti- ment des couleurs. Mais il y a bien de la différence en nos juge- mens; car, tant que nous nous contentons de croire qu'il y a je ne fçay quoy dans les objets (c'eft à dire dans les chofes telles qu'elles foientj qui caufe en nous ces penfées confufes qu'on nomme fenti- 53 mens..., tant s'en faut que nous nous méprenions, qu'au contraire nous éuitons la furprife qui nous pourroit faire méprendre, à caufe que nous ne nous emportons pas fi toll à juger témérairement d'vne chofe que nous remarquons ne pas bien connoillre. Mais, lors que nous croyons | apperceuoir vue certaine couleur dans vn objet, bien que nous n'ayons aucune connoilfance dijUnâe de ce que nous

a. Art. 48, p. 45.

b. Ibidem.

c. Mot ajouté à l'errata de la première édition

Œuvres. IV. 39

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