Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, X.djvu/632

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620 Correspondance.

attention, mais ne se voulut' pas attacher à examiner la doctrine, pour ce, disoit-elle, que, n'ayant pas ressenty cette passion, elle ne pouuoit pas bien juger d'vne peinture, dont elle ne connoissoit point l'original. Je demeurois bien d'accord, qu'elle ne connoissoit point 5 l'amour comme une passion; mais j'estime que, si elle eust voulu, elle pouuoit parler bien pertinement de l'amour intellectuel, qui regarde un bien pur, & separé des choses. sensibles, pource qu'en general je ne crois pas qu'il y ait personne au monde, qui soit plus touchée de l'amour de la "" vertu.

Enfin, après auoir tout entendu, elle ne resusa son con- sentement à aucune de vos opinions, cette ligne exceptée, ou vous supposez le monde infiniment estendu . Sur ce poinct, sa Majesié doute, qu'on puisse admettre cette hypothese i3 sans blesser la Religion Chrestienne; elle m'en dist succin- tement ses raisons, sur lesquelles je suis certain qu'elle aura très agréable l'esclaircissement que vous luy en don- neriez, sa pieté ne permettant pas qu'elle reçoiue la moindre conjecture sur les choses phisiques, qui puissent 20 (sic) blesser les fondemens du Christianisme.

Premièrement, elle estime que, si on admet une sois que le monde soit infiny en sa matière & en sa substance, à plus forte raison le croira on infiny en sa durée de toutes parts, & qu'ainsy l'hisioire de la création, designée très claire- 2 5 ment dans l'Escriture saincte, au moins quant à la remarque du temps, n'auroit pas sa plaine authorité; & quanta a la autre terme de la durée, qui est la sin du monde, il est aussy diffi- cile de la conceuoir, dans cette large infinité d'une produ- clion sans limites, ou Dieu n'auroit pas estendu l'immensité 5° de son pouuoir pour la borner par le cours de peu de reuo-

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