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M 4 Vie de Descartes.

existence, en tant qu'êtres pensants; mais il ne nous permet aucune autre certitude. La première démarche de notre pensée sera donc de nous délivrer d'une telle obsession, et pour cela, de prouver l'existence d'un Dieu de vérité, cause de notre pensée et de tout notre être pensant.

Les preuves de Dieu ne manquaient certes pas dans les écrits du temps*, soit les traités de philosophie aux mains des écoliers, soit les ouvrages des hommes de lettres aux mains des gens du monde. Elles étaient étiquetées et cataloguées avec indica- tion de leur provenance : preuves de saint Thomas, preuves de saint Anselme, etc., et on n'aurait point de peine à trouver une ressemblance entre ces preuves en quelque sorte consacrées et les arguments dont Descartes a fait choix. Toutefois notre philosophe avait pris une attitude singulière, et qui lui rendait plus difficile qu'à tout autre, de prouver Dieu, Avec son doute hyperbolique, ni le ciel ni la terre n'existe encore pour lui, ni rien ni personne au monde, en dehors de sa propre pensée. Il en est réduit à celle-ci seulement ; et encore quelle pensée ! Elle existe bien; mais son existence est la seule chose dont . elle soit assurée. Pour tout le reste, elle est incertaine, elle

a. Mersenne disait en i623 : « Toletus probat animae immortalitatem » 60 ratlonibus. » [Quœftiones celeberrimœ in Genejim,p. 3^6-3y-.)

b Voir Eustache de Saint-Paul, « le Feuillant », Summa Philofophiee, 2« édit., 161 1 : Metaphyfica, Pars IV :

« . . .Triplex eft via cognofcendi Deum naturaliter ex D. Dyonifio :

» Prima caujalicatis , cùm ab ipûs rébus effeftis ad primam caufam » omnium effeclricem progredimur. »

« Secunda eminentice, cùm quicquid perfectionis eft in rébus creatis, » Deo qui eminenter omnia continet, attribuimus. »

« Tertia remotionv:, cùm quicijuid imperfeitionis eft in Creaturis à Deo » remouemus. » (Pag. ii4.)

Et Mersenne encore, Impieté des Deijles refutée, 1624 :

« Le Theol. Nous ne manquons d'autres raifons pour conuaincre les » Athées, telles que font celles qui font prifes de cet Axiome : tout ce qui » fe meut, efi meu par quelquvn ; ou tout ce qui eft, a eftre d'vn autre, » qui ne reçoit Jon eftre d'atileurs, excepté Dieu qui a fon eftre de Joy- » mefme. Mais ie me contente de les auoir déduites en la I queftion fur » la Genefe... » (Tome I. p. m.)

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