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Vie de Descartes.

l’hiver, et chaque conseiller n’appartenait qu’à l’une des deux[1]. Joachim Descartes siégea d’abord de juillet à octobre ; puis il échangea avec un collègue, et siégea de février à avril. En outre les chemins n’étant pas sûrs en ces temps de guerre civile, pour aller de La Haye ou de Châtellerault à Rennes, plus d’une fois il demanda et il obtint d’être dispensé de siéger : c’est ainsi qu’il n’alla pas en Bretagne en 1589, 1592, 1593 et 1594, et passa tout ce temps en Poitou[2]. Par contre, il était à Rennes pour la session d’hiver, lorsque son fils René vint au monde, le 31 mars 1596 ; et il y était aussi l’année suivante, lorsqu’il perdit à la fois son dernier enfant et sa femme elle-même, 13 et 16 mai 1597.

Mais il se remaria avec une Bretonne, Anne Morin, de Nantes, où elle avait été baptisée le 2 septembre 1579[3]. On

  1. De 1554 à 1600, le Parlement de Bretagne tint deux sessions par an, d’un trimestre chacune, la première en février, mars et avril, la seconde en août, septembre et octobre ; et ce n’étaient pas les mêmes magistrats qui siégeaient à l’une et à l’autre. Mais un édit de juillet 1600, enregistré le 12 octobre suivant, rendit les sessions semestrielles : février-juillet, août-janvier. D’autre part, il y avait deux catégories de magistrats, les Bretons, ou « originaires » de Bretagne, et les Français ou « non originaires ». Bretons et Français étaient d’abord égaux en nombre : mais bientôt, par la création des nouveaux offices, l’égalité fut rompue en faveur des Français. Joachim Descartes, le père, était un de ceux-ci ; et ses fils et petits-fils, conseillers comme lui, eurent aussi des offices de « non originaires ». Tant que les sessions ne furent que de trois mois, les conseillers du dehors pouvaient fort bien ne venir à Rennes que pour cette courte durée, et demeurer les trois quarts de l’année dans leurs provinces respectives, Anjou, Touraine et Poitou. Mars lorsque les sessions durèrent six mois, la résidence de Rennes s’imposa presque à tous (Le Parlement de Bretagne, 1554-1790, par Frédéric Saulnier, Rennes, 1909, t. I, p. XIX, XXI, xxxi-xxxii). Ce serait une des raisons, sans parler de son second mariage, pour lesquelles Joachim Descartes, à partir de 1600, aurait quitté le Poitou pour la Bretagne. Et cependant, son fils aîné, dans son acte de mariage, en 1624, est encore mentionné comme appartenant « à la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, en la ville de Châtellerault, diocèse de Poitiers ». (Voir ci-avant, p. 6, note a.)
  2. Ropartz, p. 22-23, 27-28, 29-31, 32-33, 35-36.
  3. Id. p. 49. Saulnier, p. 295, donne ces deux dates pour le baptême et pour la mort d’Anne Morin : Nantes, 2 sept. 1579, et 19 nov. 1634.