Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, XII.djvu/444

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Mais bientôt elle vint rejoindre ses parents en Hollande ; Frédéric y avait trouvé un refuge auprès de sa mère, l’électrice douairière palatine, Louise-Juliane de Nassau, qui ne mourut qu’en 1644, et auprès de ses deux oncles, frères de celle-ci, les princes Maurice et Frédéric-Henri. En outre, champion malheureux de la cause protestante, il obtint des Etats une hospitalité honorable : un palais pour l’hiver à La Haye, et pour l’été une maison des champs à Rhenen, près d’Arnhem, plus une dotation annuelle. Mais le malheur s’acharnait après cette famille. Le 17 janvier 1629, le fils aîné périt misérablement : un bateau, sur lequel il se trouvait, coula dans le lac de Harlem ; le jeune prince fut noyé. Le 29 novembre 1632, son père, Frédéric lui-même, dit le Patient ou le Constant, mourut de la peste à Mayence : il avait juste l’âge de Descartes, étant né le 16 août 1596. Sa veuve, Élisabeth Stuart, resta donc seule avec dix enfants[1], dont le plus âgé n’avait pas quinze ans. Elle ne désespéra pas toutefois de rentrer au moins en possession du Palatinat, et mit son orgueil à se faire appeler reine de Bohême ; elle comptait sur l’Angleterre, comme fille de Jacques Ier et sœur du roi régnant, Charles Ier ; plus tard elle compta aussi sur la France.

La princesse Élisabeth, l’aînée des filles, joignait à une grande intelligence une instruction étendue et solide. Élevée sans doute à la française[2], toute petite elle apprit par cœur les

  1. Fille de Jacques Ier, née le 19 août 1596, elle épousa Frédéric V, le 14 févr. 1613, et mourut le 23 févr. 1662. Elle eut jusqu’à treize enfants, dont trois moururent jeunes, outre son aîné, noyé en 1629. Les neuf qui vécurent, cinq fils et quatre filles, sont, dans l’ordre de leur naissance : 1° « Charles-Louis, né à Heidelberg, 22 déc. 1617 ; 2° Élisabeth, née aussi à Heidelberg, 26 déc. 1618 ; 3° Robert (ou Ruppert), né à Prague, 27 déc. 1619 ; tous les autres naquirent à La Haye : 4° Maurice, 6 janvier 1621; 5° Louise-Hollandine, 18 avril 1622 ; 6° Édouard, 6 oct. 1624 ; 7° Henriette-Marie, 7 juillet 1626 ; 8° Philippe, 26 sept. 1627 ; 9° Sophie, 14 oct. 1630.
  2. Tome V, p. 96-97 : « … la traduction (françoiſe des Meditations) rend vos penſées d’autant plus miennes, que ie les vois bien exprimées en vne langue dont ie me fers ordinairement. »