Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/376

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L’autre, pour ébranler les gendarmes françois,
Prend l’air noble et charmant du valeureux Lisois.
Quelle honte ! Dit-il, que pour une chrestienne,
Il abandonne ainsi nostre proye et la sienne ?
Voyez que pour la suivre, il fuit les ennemis,
Que nous avons vaincus, mais qu’il n’a pas soûmis :
Et qui par son absence enflez de vaine gloire,
De son éloignement feront une victoire.
Voyez qu’en la suivant il fuit mesme nos dieux,
Qui l’ont de deux grands rois rendu victorieux.
S’il faut, pour l’en punir, que leur colere éclate,
Qu’elle n’éclate au moins que sur sa teste ingrate.
Son amour à leur gloire est trop injurieux.
Quittons, quittons un roy, qui veut quitter nos dieux.
Avant que de son sang nous voyons en sa place
Des enfans engendrez d’une chrestienne race,
Qu’un prince amy des dieux soit mis sur le pavois.
L’orgueilleux Cloderic oyt ces mutines voix.
Soudain le sang royal qui s’émeut dans ses veines,
Luy fait prendre l’appast de ces paroles vaines.
Un doux espoir le flate, et l’incite à flater
Ceux par qui sur le trône il espere monter.
Les uns sont ébranlez par ces discours rebelles.
Les autres moins legers à leur roy sont fidelles.
L’un s’émeut, l’autre tient ses pensers plus couverts :
Tout le camp se partage en sentimens divers.