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maxime de la politique. Si un homme en place s’avisoit de dire tout ce qu’il pense, tout ce qu’il sait, il exposeroit son pays à une perte certaine. Que les bons citoyens ne craignent donc point les écarts et l’intempérance de ma plume. J’ai la main pleine de vérités, et je me garderai bien de l’ouvrir en entier ; mais j’en laisserai échapper assez pour sauver la France et la République, une et indivisible.

Mes collègues ont tous été si occupés et emportés par le tourbillon des affaires, les uns dans des comités, les autres dans des missions, que le temps leur a manqué pour lire ; je dirai presque pour méditer. Moi qui n’ai été d’aucune mission, d’aucun comité où l’on eût quelque chose à faire ; qui, au milieu de cette surcharge de travaux de tous mes collègues montagnards, pour l’affermissement de la République, ai composé, presque à moi seul (qu’ils me passent l’expression), leur comité de lecteurs et de penseurs, me sera-t-il permis, au bout d’un an, de leur présenter le rapport de ce comité, de leur offrir les leçons de l’histoire, le seul maître, quoiqu’on en dise, de l’art de gouverner, et de leur donner les conseils que lui donneroient Tacite et Machiavel,