Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/128

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  DIANE,  


D'absence ou de courroux tont que son feu s'allume
Et que le fruit d'amour en est plus savoureux\
liais, quand la jalousie envieuse et depite

Entre au coeur d'un amant, rien plus ne luy profite;
Son heur s'évanouist, son plaisir luy desplaist,
Sa clairté la plus belle en tenebres se change:
Amour, dont il chantoit si souvent la loüange,
Est un monstre affamé qui de sang se repaist.

Helas 1 je suis conduit par cette aveugle rage,
Mon coeur en est saisi, mon ame et mon courage:
Elle donne les loix amon entendement,
Elle trouble mes sens d'une guerre etemelle,
Iles chagrins, mes soupirs, mes transports, viennent d'~lle.
Et tous mes desespoirs sont d'elle seulement.

Elle fait que je hay leS graces de ma dame,
Je veux mal à SOI1 oeil, qui les astres enOame,
De ce qu'il est trop plain d'attraits et de clairté;
Je voudrois que son front fust ridé de vieillesse;
La blancheur de son teint me noircist de tristesse,
Et depite le ciel voyant tant de beauté.

Je veux un mal de mort à ceux qui s'en approchent
Pour regarder ses yeux, qui mille amours décoChent,
Ace qui parle à elle et à ce qui la suit;
I~ soleil me desplaist, sa lumiere est trop grande,
Je crains que pour la voir tant de rais il espande,
.ais si n'aimay-je poiftt les ombres de la RUft.

Je ne sçauroy aimer la terre où elle touche,
Je hay l'air qu'elle tire et qui sort de sa bouche,
suis jaloux d~ l'eau qui lui lave les mains,
n'aime point sa ehambre, et j'aime moins encore