Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/148

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  DIANE,  



LVII.


J’ai tant souffert d’ennuis, de honte et de misere,
Depuis qu’à vos beaux yeux mon esprit s’est rendu;
Mon âge et mon labeur j’ai si mal despendu,
Que j’en sers de risée et de fable au vulgaire.

Je veux rompre mes fers, plein de juste colere,
Et perdre heureusement l’amour qui m’a perdu.
L’eussé-je fait plus tost 1J’ai bien tard attendu,
Mais si n’est-ce pas peu de m’en pouvoir deffaire.

Loin, loin, bien l~in de moy, pensers fallacieux,
Espoirs faux et trompeurs, desirs ambitieux,
Et des travaux passez souvenir trop durable.

J’appen à Nemesis, pour acqulter mes voeux,
Ces traits qu’elle a rompus, ces flambeaux et ces noeux,
Esteints et deliez par sa main secourable.


LVIII.


Le robuste animal dont l’Inde est nourriciere,
Qui, pour n’estre poilu, se purge et va lavant,
Afin que, plus devôt, il puisse, en arrivant
La nouvelle Diane, adorer sa lumière:

S’il faut monter sur mer, par force ou par priere,
Estant prés du vaisseau, ne veut passer avant
Si son maistre ne parle et lui jure devant
De sain le reconduire en sa terre premiere :

lIoy, plus lourd mille fois et plus mal advisé,
Sur mer, à tous perils je me suis esposé,
Sans promesse Id’Amour, mon guide en ce voyage.

Donc, ô belle Diane, helas! asseurez moy
~i, pour vous adorer seule, ainsi que je dOl,
De,toute vieille erreur j’ai purgé mon courage.