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  LIVRE II. 66



LIX.


Belle et cruelle main, quI m'avez enehaisné
Dans la prison d'Amour, mon antique adversaire,
Estant si delicate, hé! comment se peut faire
Qu'un coup si dangereux par vous me soit donné?

lion coeur, nouveau captif, en est tout estonné,
Iles sens tous esperdus; et mon oeil temeraire,
De vous voir pour son mal ne se sçauroit distrairp,
Tant la beauté l'attire et le rend obstiné.

Par un nouvel effort mon ame est surmontée.
Je sça,'oy bien que Mars, par sa main r~outée.
Fait ces actes guerriers et se rend plus connu;

Mais que ma liberté deust estre retenuë
Par une main si tendre, eI\C0re toute nuê,
Ce miracle est Amoy seulement advenu.


LX.


Chacun jour mon esprit loin du corps se retirp;
Je tombe en pâmoison, je pers le mouvement,
)(a couleur devient palle, et tout en un moment
Je n'enten, je ne voy, je ne sens ny respire.

Revenant puis apres, vers le ciel je souspire,
rouvre les yeux ternis; je m'esmeus doucement,
Comme un qui a dormy, puis, sans estonnement,
J'alten le pront retour d'un si lasche martire.

Ceux qui voyent comment ce mal me met au bas,
Comme il revient soudain, n'attendent qu'un trespas
Qui ces petites morts d'heure à autre finisse.

Il ne m'en chaut pour moy; c'est tout mon reeonfort.
liais pour vous je m'en plains, qui perdrez à ma mort
Un coeur qui D'estoit nay que pour vostre service.