Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/158

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  DIANE,  



LXX.


Pendant que mon esprit mille douceurs conçoit,
Et qu'en vous adorant, tout ravy je soupire,
Amour, par vos regars, mille fleches me tire
Et captive mon coeur qui ne s'en apperçoit.

Car, voyant vos beautez, le grand beur qu'il reçoit
Fait qu'il est insensible au plus cruel martire
Et croit que tout le ciel n'a pouvoir de luy nuire:
Tant l'excez du plaisir quelquefois flOUS deçoit!

liais, quand je suis forcé d'éloigner vostre veuë,
Trop tard je m'apperçoy de ma perte advenuë,
)fon oei~se change en source et Jllon ame en flambeau.

La mort Mesme à l'instant m'oste toute puissance,
Et je mourrois 'heureux, si j'avois asseurance
Que mQ..D coeur si fidelle eust vos yeux pour tombeau.


LXXI.


Chaste soeur d'Apollon dont je suis esclairé,
Le jour comme la nuiet deïté redoutable,
Que la force d'Amour a connuë indontable,
Amour des autres dieux tant craint et reveré!

Voy ce pauvre Acteon sans pitié devoré
Par ses propres pensers d'une rage incroyable,
Pour avoir offensé d'erreur trop excusable,
Si le feu de ta haine estait plus moderé.

Il fut audacieux, mais sa haute entreprise
Avec tant d~ rigueur ne doit estre reprise,
Ains merite plustost loyer que chastiment.

Toutesfois si ton ire autrement en ordonne,
Bien, il souffrira tout: s'escriant au tow'ment,
Que trop douce est la mort quand Diane la donne.