Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) I - Diane. Premières Amours.djvu/74

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  DIANE,  


Royne, qui tiens en nous la divine partie,
Qui nOU8 conduits au ciel, lieu dont tu es sortie,
Atoy de ce cruel j'ose me lamanter,
Afin qu'ayant ouy quelle est sa tyrannie,
Et comme estrangement ses sujets il manie,
Par ton juste support je m'en puis exanter.

Sur l'avril gracieux de ma tendre jeunesse,
Que j'ignorois encor que c'estoit de tristesse,
Et que mon pié volloit quand et ma volonté;
Ce trompeur que tu vois, jaloux de ma franchise,
Masquant de deux beaux yeux sa cruelle entreprise,
Avec un doux accueil deçeut ma liberté.

Mais qui se fust gardé de se laisser surprendre,
Et qui de son bon gré ne se fust yenu rendre,
VOYlbt avecques luy tant de douces beautez?
Qui ne se fust promis un bien heureux voyagp.,
Ayant la mer paisible, étant près du l'ivage,
Et les petits zephyrs soumans de tous costez?

Il se monstroit à moy sur tout autre amiable,
Il ne me faisoit voir qu'un printans desirable;
Son visage estoit doux, doux estoient ses propos,
Et l'oeil qui receloit tous les traoits de sa trousse
Mc perta l'estomach d'une façon si douce,
Que j'estimoy ma peine un dcsiré repos.

Mais il ne dura guere en ceste douce sortt',
c'ar, si tost que mon coeur luy eut ouvert la porte,
Et que mes sens craintifs eurent reçeu sa loy,
n dépoüilla soudain sa Ceinte couvertuI'P.,
Il'enseignant mon erreur d'avoir fait ouverture
Ainsi legerement à plus puissant que moy.