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Page:Desrosiers - Dans le nid d’aiglons, la colombe, 1963.djvu/80

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dans le nid d’aiglons, la colombe

une vocation aussi dure, on suppose qu’une rencontre avec Dieu, qu’une expérience préalable avec Dieu se sont produites à un certain moment. Dans ses curieux livres, Monica Baldwin, qui avait passé vingt-huit ans dans une communauté de contemplatives ordinaires, affirme qu’une bonne partie de ses compagnes les avaient éprouvées. À plus forte raison, se dit-on, une recluse du type de Jeanne Le Ber. Elle court certainement toute sa vie sur les traces du parfum du Sauveur. On cherche et on cherche pour trouver des indices plus probants.

Heureusement, elle a fourni elle-même, sans s’en douter, la preuve désirée. Son premier historien, M. Vachon de Belmont, nous l’apporte en racontant une simple anecdote, mais d’allure classique, dans son style d’autrefois, et qui nous ressuscite la recluse toute vivante.

C’est en 1698, Monseigneur de Saint-Vallier est à Montréal. Il règle le cas de la Congrégation de Notre-Dame, approuve une constitution, fait prêter les vœux devant lui ; les religieuses ont choisi leurs noms. Il profite de l’occasion pour visiter Jeanne Le Ber, car les Sulpiciens lui ont réservé ce droit. Mais ce n’est pas tout et voici l’anecdote savoureuse :

« Deux Anglois ayant témoigné à Monseigneur de s/t valier Le désir qu’ils avoient dela voir dans sa solitude, il voulut luy meme Les y conduire ; ils furent Extraordinairement surpris dela voir dans un si petit appartement. Lun deux qui étoit ministre luy demandat pour quoy elle se gênait tant puisquelle auroit pu vivre dans le monde avec toutes ses aises et commodité, car il connaissoit sa famille. Elle luy répondit que cétoit une pierre d’aiman qui lavoit ainsy atirée et séparée de toutes choses. Il voulut sçavoir quelle étoit cette pierre