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IV

LA RIVIÈRE ROUGE



LE rendez-vous général entre les agents de Montréal et les Bourgeoys hivernants se tient cette année dans un décor nouveau. La Compagnie vient d’abandonner Grand Portage qu’une délimitation de frontières a placé en territoire américain. Alors les brigades des pays d’En-Haut doivent descendre plus loin, à Kaministiquia, au fond de la baie du Tonnerre, sur les bords de la rivière au Chien, en suivant, pour la dernière partie du trajet, l’ancienne route des Français.

Simon McTavish est toujours au poste. Mais il semble cette année vieilli, fatigué, plus lourd et plus lent dans ses mouvements. Pourtant, c’est l’époque de la grande prospérité pour le Marquis ; une résidence princière, au pied du Mont-Royal, révèle sa grande fortune, et la seigneurie de Terrebonne occupe ses loisirs.

Il accorde une entrevue à Montour qui lui raconte toute l’affaire, sans faux-fuyants, comme il l’a déjà racontée au Bancroche.

— Alors, vous rapportez trois fois plus de fourrures que votre prédécesseur ?

— Oui.

— Splendide, splendide. Mais les Indiens parleront-ils ? Et le Bison Blanc ?

— Les faits démentiraient leurs paroles, voyez-vous. J’ai pris certaines mesures ; mon poste a été attaqué aussi bien que les deux autres, des balles ont été tirées sur nos palissades. Le besoin de munitions sera toujours une explication satisfaisante de l’attaque. Puis, les engagés des Petits et de la Compagnie de la baie d’Hudson jureront partout que j’ai eu

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