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soudoyé, eux aussi, une bande de Saulteurs, et ils l’ont lancé sur les territoires de chasse de la Compagnie du Nord-Ouest.

Alors Montour doit partir de nouveau. Mais avant son départ, il a un entretien avec Provençal ; et Turenne, qui connaît ses ruses maintenant, sait que la surveillance qui l’enveloppe ne cessera pas. Car Montour, à mesure qu’il augmente la pression, qu’il force, par ses manœuvres, une décision, rapproche l’échéance, Montour redouble toujours la surveillance.

Pour Turenne, pourtant, ces jours de répit sont précieux.

Montour s’éloigne. Sur les traînes tirées par les chiens, il n’emporte cette fois que des vivres. Pas de boisson.

Après avoir trouvé les wigwams étrangers, il rassemble tous les Saulteurs envoyés par les Petits ; et les délibérations commencent. À côté de lui se tient la Barbiche Blanche, son beau-père.

Tous deux, ils parlent à tour de rôle ; ils allèchent la bande par des promesses d’eau-de-vie, de meilleurs prix, de cadeaux. Pourquoi aussi rembourser leurs crédits aux Petits ? Cette compagnie est à la veille de disparaître. Montour leur donnera de nouveaux crédits, lui, et les Indiens obtiendront ainsi double prix pour leurs fourrures.

Le chef de la tribu, le Cerf, résiste quelques heures ; puis il se rallie à l’opinion des autres qui sont disposés à accepter sans scrupule.

En compagnie de cette nouvelle bande, Montour revient à son fort. Il réfléchit. Ses Indiens à lui, en qui il met plus de confiance, il pourrait les laisser dans le nord du district, à proximité des forts des Petits et de ceux de la Compagnie de la baie d’Hudson. Quant aux nouveaux venus, pourquoi ne pas les envoyer au sud, là où le castor n’a pas été travaillé ? Le produit de leurs chasses serait certainement plus abondant et ils demeureraient à l’abri des tentations.

Montour en touche quelques mots au Cerf. Mais celui-ci refuse d’en entendre parler. Les Saulteurs se trouveraient trop rapprochés des Sioux ; ils habiteraient même sur les territoires

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