Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, première série, 1914.djvu/33

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vres petits éclopés qu’on y apporte. On fait le plus de place possible, mais quand il n’y a plus un coin, la mère, désolée, rapporte son enfant, à la mort souvent, et le cœur de celles qui n’ont pu l’admettre saigne comme le sien.

Pour vous faire bien comprendre et bien sentir ce que l’on attend de votre charité, mes amies, il me semble que je ne puis faire mieux que de vous engager à visiter les salles blanches de l’Hôpital Sainte-Justine. Aucune description ne vaut un tableau comme celui-là. Vous ne pourrez plus oublier les figures ravagées et grises de ces petits vieillards grimaçant un sourire sans rayon, qui vous étreint le cœur de pitié. Quand, les ayant vus, vous songerez qu’il y en a tant et tant de ces petits martyrs que personne ne soigne, qui agonisent des mois et des années dans la saleté et la faim, privés des soins les plus élémentaires, vous ouvrirez votre cœur et votre bourse, et votre pitié de femme qui se change si facilement en dévouement, fera de vous des amies de l’œuvre.

J’en appelle aux mères dont la sollicitude inquiète et tendre s’alarme pour un simple rhume et je leur demande : avez-vous déjà pensé à la souffrance qui est le partage des bébés pauvres dès avant leur naissance, quand la mère qui les porte travaille au delà de ses forces et ne mange pas à sa faim ? Ils naissent chétifs, quelquefois infirmes, ils sont moins bien nourris que les chiens et les chats