Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, seconde partie.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’ai donc eu tort d’annoncer un art de parler et un art de raisonner : mais j’ai eu encore bien plus tort de dire qu’il me serait aisé de les faire. Je ne sens que trop qu’il n’en est rien. Sans doute, c’est un grand point de s’être rendu compte de ses facultés intellectuelles et de leurs résultats ; et la conviction intime de n’y plus rien voir d’obscur ni d’embarrassant, donne une ferme confiance que l’on réussira à démêler le fil du discours et du raisonnement. On ne conçoit même pas que d’autres aient osé l’entreprendre sans ce préalable. Mais quelque grand que soit cet avantage, quand on met la main à l’œuvre, on s’aperçoit bien vite de tous les obstacles qui restent à vaincre. On voit clairement combien il y a de distance entre les premières vérités et leurs dernières conséquences ; combien il est difficile de parcourir tout l’intervalle qui les sépare ; combien il est aisé de s’égarer dans le trajet ; et le découragement est prêt à remplacer l’excès de confiance. Cependant, où ne peut-on pas arriver, quand on part d’un point bien connu, et que l’on suit une bonne route ?
La Grammaire, il est vrai, est une science