Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, seconde partie.djvu/59

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jugement, et les autres ne signifient pas même une idée toute entière : et on peut dire qu’il n’y a dans aucune langue, que ceux que nous appelons des noms, qui représentent à eux seuls, une idée complète et unique. Mais pour que rien ne manque à la bizarrerie, souvent ces noms sont employés comme signes incomplets, comme quand un substantif est pris adjectivement ; et en outre tous les mots qui expriment, ou une proposition toute entière, ou seulement un fragment d’idées, peuvent être assez détournés de leur destination ordinaire, pour être employés comme noms : alors ils expriment une idée unique et entière. Quand je dis, non est une particule, et courageux est un adjectif, l’un et l’autre sont réellement substantifs. Non n’exprime plus telle ou telle réponse négative à une proposition antérieure, mais représente l’idée pleine et complète d’un certain mot qui en français a telles fonctions ; et il en est de même de courageux. De même encore toute une proposition, même très-complexe, devient un seul substantif, le vrai nom d’une idée, quand elle est représentée par un pronom. Ajoutons à cela que le même mot sert tantôt à en modifier, tantôt à en