Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 1, Hachette, 1911.djvu/396

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bitudes tranquilles dans la vie privée, mais excitables au dehors. Ils cassèrent à coups de baïonnette les vitres de plusieurs fenêtres, et mirent le commandant en chef dans l’impérieuse nécessité de les placer sous la garde d’une forte escouade, avec laquelle ils se battirent par intervalles tout le long du chemin. Voilà pourquoi notre serrurier n’atteignit pas son domicile avant neuf heures. Une voiture de louage attendait près de la porte ; et, au moment où il entrait, M. Haredale, passant la tête à la portière, l’appela par son nom.

« Voilà une vue qui peut guérir les ophthalmies, monsieur, dit le serrurier en s’avançant vers ce gentleman. Je regrette que vous ne soyez pas entré, plutôt que d’attendre ici.

— Il n’y a personne chez vous, à ce qu’il paraît, répondit M. Haredale ; je désire d’ailleurs que nous ayons un entretien aussi particulier que possible.

— Hum ! marmotta le serrurier en jetant un regard autour de la maison. Parties avec Simon Tappertit, sans doute pour aller à cette précieuse succursale ! »

M. Haredale l’invita à monter dans la voiture, et, s’il n’était pas fatigué ou trop pressé de rentrer au logis, à faire une petite promenade avec lui pour pouvoir causer un peu ensemble. Gabriel y consentit avec plaisir, et le cocher, montant sur son siége, lança les chevaux.

« Varden, dit M. Haredale après une pause d’une minute, vous serez stupéfait en apprenant la mission dont je me suis chargé ; elle vous paraîtra bien étrange.

— Je ne doute pas qu’elle ne soit raisonnable, monsieur, et fort sensée, répliqua le serrurier ; sans cela, vous ne vous en seriez pas chargé. Ne faites-vous que de revenir à la ville, monsieur ?

— Il n’y a qu’une demi-heure que je suis à Londres.

— Vous n’apportez pas de nouvelles de Barnabé ni de sa mère ? dit le serrurier d’un air inquiet. Ah ! vous n’avez pas besoin de secouer la tête, monsieur. C’était une chasse aux oies sauvages. Je m’en suis bien douté dès l’origine. Vous aviez épuisé tous les moyens raisonnables de les découvrir lorsqu’ils sont partis. Et, après un si long temps, il n’y avait guère d’espérance de recommencer vos recherches avec succès.