Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/360

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tant un peu rétabli, il les remercia de leur sympathie, et, prenant la liberté de les informer qu’il y avait quelqu’un de malade dans la maison, il leur proposa trois hourras en faveur du roi Georges, trois autres en faveur de la vieille Angleterre, puis trois autres en faveur de n’importe qui, pour la clôture. La foule y consentit, en substituant seulement le nom de Gabriel Varden dans le hourra de n’importe qui, et en lui en donnant un de plus, pour faire la bonne mesure ; puis elle se dispersa pleine de bonne humeur. Ainsi finit la cérémonie.

Toutes les félicitations échangées parmi les habitants de la Clef-d’Or, quand on les eut laissés tranquilles ; le débordement de joie et de bonheur qu’ils ressentaient ; la difficulté où Barnabé en personne se trouvait de l’exprimer autrement qu’en allant comme un fou de l’un à l’autre, jusqu’à ce qu’enfin, ayant recouvré plus de calme, il vint s’étendre par terre auprès de la couche de sa mère, et y tomba dans un profond sommeil : tout cela n’a pas besoin de se dire ; heureusement, car ce ne serait pas facile à décrire, si c’était nécessaire à notre récit.

Avant de quitter cette scène charmante, nous ferons bien de jeter un coup d’œil sur un tableau plus sombre et d’un genre tout différent, qui, cette nuit-là même, avait eu un petit nombre de spectateurs.

C’était dans un cimetière, à l’heure de minuit ; il n’y avait d’autres assistants qu’Édouard Chester, un ministre, un fossoyeur, et les quatre porteurs d’une bière grossière. Ils se tenaient tous debout autour d’une fosse nouvellement creusée, et l’un des porteurs tenait à la main une lanterne sourde, la seule lumière qui éclairât ces lieux funèbres, pour répandre sa faible lueur sur le livre d’offices. Il la plaça un moment sur le cercueil, avant de la descendre avec l’aide de ses compagnons. Le couvercle de la bière ne portait aucune inscription.

La terre humide retomba avec un bruit solennel sur la dernière demeure de cet homme sans nom ; et le bruit du gravier laissa un triste écho même dans l’oreille endurcie de ceux qui l’avaient porté à son dernier asile. La fosse fut remplie jusqu’au haut, puis aplanie en piétinant dessus, et ils s’en allèrent tous ensemble.