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faire la lecture. C’est dans un de ces moments-là que je l’informai du sort qui m’était réservé.

Nous avions, en outre d’Éva qui venait nous voir tous les jours, un certain nombre de visiteurs ; Prince, le premier de tous, qui ne manquait pas de venir, entre chacune de ses leçons, jeter un coup d’œil plein d’affectueuse inquiétude sur la mère et l’enfant. Quelque vives que fussent alors ses souffrances, Caddy lui déclarait toujours qu’elle allait beaucoup mieux ; et que le ciel me pardonne ! mais je confirmais le pieux mensonge. Prince en était si content, que parfois il prenait sa pochette et en jouait un petit air pour égayer le bébé, qui n’y paraissait pas fort sensible.

Mistress Jellyby venait de temps en temps savoir des nouvelles de Caroline ; elle s’asseyait d’un air calme en regardant à quelques milles au delà de sa petite fille, comme si elle eût été absorbée, pour le moment, par un négrillon des rives du Niger ; et toujours souriante et sereine, toujours aussi mal attachée qu’autrefois, elle disait de sa voix douce : « Comment allez-vous aujourd’hui, ma chère enfant ? » et sans attendre la réponse, elle commençait à parler du nombre de lettres qu’elle avait reçues depuis peu, ou de la fécondité du sol de Borrioboula-Gha pour le café.

M. Turveydrop, qui, du matin au soir et du soir au matin, était le sujet de précautions incessantes de la part de Caroline et de Prince, venait une fois par jour répandre sa bénédiction sur sa belle-fille ; et dispensait autour d’elle la lumière de sa gracieuse présence, avec tant de bonté protectrice, que je l’aurais pris, si je ne l’avais connu, pour le bienfaiteur de ses enfants.

« Chère fille, lui disait-il en s’inclinant légèrement, dites-moi que vous allez mieux aujourd’hui.

— Merci mille fois, M. Turveydrop ; je vais en effet beaucoup mieux, répondait Caroline.

— J’en suis ravi ; et cette chère miss Summerson n’est-elle pas horriblement fatiguée ? » ajoutait-il en plissant les paupières et en baisant le bout de ses doigts à mon intention, bien que ses attentions à mon égard eussent beaucoup diminué depuis la maladie qui m’avait tant changée.

« Du tout ; je ne sens pas la moindre fatigue, lui répondais-je.

— Charmant, adorable ! il faut soigner cette chère Caroline, miss Summerson ; ne rien épargner pour lui rendre ses forces. Mon enfant, poursuivait-il en s’adressant à sa belle-fille avec une condescendance pleine de grâce, ne vous privez de rien ;